8. Le respect mutuel comme facteur de changement

Et eux aussi sauront comment nous honorer, si nous savons honorer le yichouv qui grandit pour toutes ses forces remarquables. Il y a là un enseignement : si tu veux amener quelqu’un à faire techouva, ne lui dis pas : “moi je suis bon et toi tu es méchant, je vais t’expliquer comment devenir comme moi”, mais dis-lui au contraire : “tu es bon, et moi je suis méchant et j’ai à apprendre de toi. Je reconnais et j’apprécie les capacités que tu as”. Cela ne veut pas dire que nous soyons d’accord avec tout ce que font les hilonim, mais si je leur parle ainsi ils me respecteront, comme il est écrit : “Il ramènera le cœur des pères vers les fils, et – de ce fait – le cœur des fils vers leurs pères” [Malachie 3, 23]. Il est dit également : “Qui est respecté ? Celui qui respecte les autres » [Traité des Pères 4, 1] – celui qui a de l’estime pour les autres.

Ceci fait partie de la mitsva de la réprimande. Cette mitsva obéit à une logique rigoureuse. Il faut dire : « Vois, tu as en toi de grandes capacités, elles sont le fondement de ta personnalité. Elles donnent lieu aussi à toutes sortes d’effets secondaires, mais à la base, tu as un grand potentiel”.

Les hommes de la Génération sauront aussi comment être attirés, avec toute la chaleur d’un cœur plein d’amour et d’intelligence précieuse, … Cette génération est pleine de chaleur, d’enthousiasme et d’énergie. Elle est ‘pleine d’amour’, elle aime aimer, et elle est aussi pleine d’idées : elle est contestataire, elle aime les choses intelligentes. On ne peut pas lui dire d’autorité : “C’est comme cela !”. Le problème est que toute cette chaleur, tout cet amour et toute cette intelligence sont gaspillés pour des sottises et des futilités …au son de toute parole jaillie du puits d’eau vive,“je ne viens pas effacer ton monde, mais le faire continuer vers ce à quoi il est vraiment destiné” dit la Génération, du trésor de l’âme de l’Assemblée d’Israël aspire, par sa résurrection, donner vie à l’humanité entière – toutes les forces de vie. “Maison de Jacob, allons et marchons à la lumière de l’Éternel”  [Isaïe 2, 5].

Le mouvement ‘Bilou’ a été nommé d’après les initiales de la première moitié de ce verset [‘Maison de Jacob, allons et marchons’ = ‘Beit Iaakov Lekou Vénelkha’ = B.I.L.U.]. Le Rav Sholom Dovber, le cinquième Admor de Loubavitch, qui s’est violemment opposé au sionisme, dit au début du retour à Sion que les Bilous étaient des hérétiques et des êtres corrompus. Il dit aussi, et c’est le résumé de sa thèse, que si le nom du mouvement avait été ‘Biloubi’, en y incluant la deuxième partie du verset [‘à la lumière de l’Éternel’ = ‘Béor Hachem’ = B.I.], il y aurait associé sa hassidout.  Quant à notre maître le Rav Kook, il dit : “Je ferai en sorte que ce soit ‘à la Lumière de l’Éternel’ !”. C’est ce qu’il écrit à de nombreux endroits dans ‘Orot’ les tsadikim doivent faire en sorte que la Délivrance ait lieu ‘à la Lumière de l’Éternel’. Cette remise en ordre commence par la prise de conscience de l’immense valeur de : “Maison de Jacob, allons et marchons”, de son caractère merveilleux à l’époque et aujourd’hui, et du caractère merveilleux de tout ce qui en a découlé : la création de l’État, etc.

Sur un chemin de vie comme celui-ci, quand se multiplieront chez nous les servants du service divin véritable, c’est-à-dire les hommes qui sont vivants d’après Maamar Hador, et non ceux qui ne cessent de “protester avec la dernière énergie” contre toute profanation d’une chose sainte. Un jour, quelqu’un demanda au Rav notre maître : “Pourquoi les gens ne protestent-ils pas contre la profanation de la sainteté ? C’est la source de tous les problèmes  !”; et notre maître répondit : “Le problème, c’est qu’ils ne savent que protester, et rien d’autre”. On ne peux pas guérir un malade en le critiquant sur la manière dont il s’occupe de son corps, il faut poser un diagnostic et prescrire un traitement. Un exemple de ‘serviteur du service divin véritable’ est le Sfat Émet, dont les écrits ressemblent aux enseignements du Rav notre maître, mais dans le style hassidique ; un autre exemple est Rabbi Tsadok Hacohen de Lublin, dans le style mitnagued ; et plus que tous le Rav notre maître, dont le style est novateur et très particulier, sans précédent dans la littérature rabbinique. Rabbi Tsadok Hacohen et le Sfat Émet se sont occupés essentiellement d’améliorer les individus, alors que le Rav notre maître a parlé de la résurrection de la nation d’Israël. C’est le service divin ‘ancien-nouveau’ [c.a.d. renouvelé à partir de l’ancien oublié qui reparaît].

… épierreurs de chemins et aplanisseur de routes, … Il faut épierrer ce chemin-là. Certains disent : “C’est un chemin difficile, et il ne convient qu’au Rav Kook lui-même” – ce n’est pas vrai. Déjà un siècle est passé et nous savons épierrer… sans tarder se révélera et apparaîtra devant nous la splendeur majestueuse de la génération de nos fils.

Un certain professeur écrivit que le Rav Kook avait fait fausse route, puisqu’il avait écrit ‘sans tarder’ et qu’il s’était déjà passé cinquante ans sans que rien n’arrive. Aujourd’hui nous pouvons même y rajouter encore cinquante ans. Mais il n’a simplement pas prêté attention à la parole de nos sages, que ‘rapidement’ correspond à un laps de temps qui peut durer huit cents cinquante ans [voir Rachi sur Daniel 9, 14] ! C’est la même chose quand nous souhaitons “que le Temple soit reconstruit rapidement et de nos jours : l’aménagement des routes ne se fera pas en un instant, surtout s’il n’y a pas abondance ‘d’épierreurs de chemins’, et si l’on continue de critiquer sans cesse la Génération…

L’amour vigoureux de nos chers fils pour notre peuple et pour notre terre de sainteté apparaîtra, et projettera même sa lumière lorsqu’il s’élargira et s’élèvera, lorsqu’il se remplira de conscience et de sentiment de vérité au sujet de l’amour de notre Bien-Aimé, notre berger, Berger d’Israël, Dieu du monde, Rocher de Yaakov. La voie de l’amour de la nation et de la Terre les amènera à la foi en Dieu, comme l’a écrit Rabbi Méïr Simha Hacohen de Dvinsk [‘Méchekh Hokhma’, Deutéronome 30, 2] : « Car après être revenu vers son peuple, bien sûr il reviendra vers son Dieu, il reviendra de sa sottise et il guérira ». “Je te trouverai au dehors et je t’embrasserai, ils ne me feront même pas honte” [Cantique des Cantiques 8, 1]. Ils deviendront amoureux de Dieu, ce ne sera plus une chose honteuse d’être proche de Dieu.

C’est l’amour de la Thora de vie qui est le signe de l’Alliance, pour la Terre de vie et pour le peuple choisi [‘am segoula’]. Au bout du compte se révélera l’amour de la Thora de vie, dont la vocation est d’amener l’humanité entière à la résurrection. Le peuple choisi sur la Terre de vie a besoin d’une Thora de vie. “L’un dira : ‘je suis à Dieu !’ – ceci est le niveau de l’homme juste, qui a la crainte de Dieu – un autre proclamera : ‘au nom de Yaakov !’ je suis juif !’ – et un autre écrira de sa main : ‘à Dieu, et se fera appeler du nom d’Israël” [Isaïe 44, 5].

Rabbi Tsadok Hacohen de Lublin écrit [Tsidkat Hatsadik § 54, non mentionné dans certaines éditions] : “L’essentiel de la judéité réside dans le fait d’être appelé par le nom d’Israël, comme il est dit : ‘L’un dira : je suis à Dieu ! … et un autre … se fera appeler par le nom d’Israël’, car s’il n’avait en lui que cette qualité de se faire appeler par le nom d’Israël, cela suffirait. Et nous trouvons au début du chapitre ‘Klal Gadol’ de la Guémara de Chabbat [68b] : ‘celui qui s’est converti parmi les nations et qui apporte un sacrifice expiatoire pour la consommation de graisse interdite, pour la consommation de sang, pour la transgression de Chabbat et pour la pratique de l’idolâtrie, qui ne savait pas du tout que c’était interdit, même pour l’idolâtrie et pour le Chabbat, et qui s’avère ne rien connaître de toute la Thora, en quoi est-il un converti, redevable d’un expiatoire ? – pour la seule raison qu’il se réclame du nom d’Israël…’ Et c’est dans ce sens qu’il est dit : ‘Ephraïm s’est lié aux idoles ? – qu’on le laisse !’ [Osée 4, 17]. Car il reste attaché à une seule nation, ils ne s’est pas mis à l’écart pour rejoindre les autres nations et s’y intégrer”.

Il n’aura plus honte d’être appelé par ce nom devant tout le grand monde éclairé, car il reconnaîtra la force et la vérité qui sont en lui.

Le cœur des pères – d’abord – commencera par prendre conscience de tout le trésor de bien, et de la richesse cachée qui est dans leurs fils, dans la profondeur de leur âme alerte et vive, et – à partir de là – les fils prendront conscience de la sainteté et de la pureté, de la splendeur et de la magnificence qui sont entières dans le cœur des pères, – toutes les qualités morales, les mitsvot, la sainteté, la prière, qu’on trouve chez les harédim ‒ toutes choses qu’ils ont acquises en patrimoine au fil des générations par la fidélité à la sainteté de la Thora et des mitsvot, et par l’attachement profond au Nom de l’Éternel Dieu d’Israël, qui réside à Sion et choisit Jérusalem. Chacun prendra de son prochain tout ce qui est bon, tout ce qui est agréable et approprié, les pères des fils et les fils des pères, comme l’a expliqué à plusieurs reprises le Rav notre maître, à la lumière de la sagesse, du courage, de la force et de la modestie des deux parties, car toutes ces choses amèneront à la certitude absolue que c’est seulement par l’union spirituelle du jeune Israël avec l’ancien Israël – le ‘Nouveau Yichouv’ et ‘l’Ancien Yichouv’ – que viendra le salut et que fleurira la Délivrance.

“J’ai mis mes paroles dans ta bouche, et Je t’ai abrité à l’ombre de ma main, pour implanter les cieux et fonder la Terre, et pour dire à Sion : ‘tu es mon peuple’” [Isaïe 51, 16]

“Mon inspiration qui est sur toi, et mes paroles que J’ai mises dans ta bouche, ne s’écarteront pas de ta bouche, ni de la bouche de ta descendance, ni de la bouche de la descendance de ta descendance, dit l’Éternel, dès maintenant et à jamais”  [Isaïe 59, 21].