8. La spiritualité du sionisme


(Guerre des Six Jours – Libération de Jérusalem)


Traduction simple :

Dans les profondeurs du cœur, dans ses chambres les plus pures et les plus saintes, la flamme d’Israël s’élève et requiert avec force une liaison étroite et permanente entre la vie et toutes les mitsvot de l’Éternel, afin de déverser l’esprit divin (l’esprit d’Israël dans toute sa plénitude, qui occupe entièrement l’espace de l’âme) à l’intérieur des multipes récipients qui lui sont spécifiques, afin de faire ressortir la pleine expression d’Israël dans une complète évidence, dans les actes et dans les idéaux.

Les braises s’enflamment dans le cœur des justes, un feu de sainteté brûle et flamboie; et dans le cœur de toute la nation il se consume perpétuellement : “Un feu perpétuel brûlera sur l’autel, il ne s’éteindra pas” ; et dans le cœur de tous les sots d’Israël, et dans le cœur de tous les scélérats d’Israël, ce feu se consume et brûle au plus  profond.

Dans la nation entière, tout désir de liberté, toute envie de vivre, tant collective qu’individuelle, tout espoir de délivrance, n’émanent que de cette source de vie, afin de vivre pleinement la vie d’Israël, sans se cacher ni se limiter. Telle est l’aspiration à la Terre d’Israël, pays de sainteté, terre de l’Éternel, où toutes les mitsvot prennent corps et ressortent dans leur pleine intégrité.

Ce désir intense de publier le caractère de l’esprit divin, de relever la tête dans l’esprit divin revêtu de sa grandeur authentique, mobilise tous les cœurs, et tous désirent s’unir à lui pour goûter aux délices de sa vie : “C’est pourquoi j’aime tes mitsvot plus que l’or le plus fin”. La bravoure du cœur, qui montre au monde entier la détermination de la nation à préserver son caractère, son nom et ses valeurs, sa foi et son idéal, fait partie du désir ardent d’une vie de vérité, d’une vie de toutes les mitsvot, sur laquelle la lumière de la Thora brillera pleinement dans toute sa bienfaisance. 

S’il paraît étonnant, aux yeux de quiconque se tient au loin, que dans tous les courants de pensée qui s’éloignent apparemment de la foi elle-même, puisse palpiter le souffle de la vie dans sa force intérieure, [tourné] non seulement vers une approche générale de la Divinité, mais aussi vers la vie d’Israël véritable, vers l’observance détaillée de l’ensemble des mitsvot, dans la conception et dans l’idée, dans le lyrisme et dans la pratique, – cela n’étonnera nullement celui qui est lié dans les profondeurs de son esprit aux profondeurs de Knesset Israël, et qui connaît les merveilles de ses ressources cachées. Là est le secret de la bravoure, la montée en puissance de la vie qui ne s’achèvera jamais : “Vous observerez mes décrets et mes lois, que l’homme applique et par lesquels il vit ; Je suis l’Éternel” ; “ ‘Pour marcher devant l’Éternel dans les terres de la vie’ c’est la Terre d’Israël”.


TEXTE HÉBREU ORIGINAL


Commentaire du Rav Aviner :

Le chapitre que nous abordons résume tous les précédents. Le Rav notre maître n’écrivait pas de manière suivie, il notait ses idées dans des carnets comme elles lui venaient à l’esprit, et c’est notre maître le Rav Tsvi Yéhouda qui les ordonna méthodiquement en paragraphes.

Le livre du Zohar nous enseigne qu’il ne faut pas regarder les choses de l’extérieur mais de l’intérieur ; il faut se tourner vers l’intériorité secrète d’Israël, vers la profondeur de son âme. En effet, dans les profondeurs du cœur, que la chose soit connue ou qu’elle ne le soit pas, dans ses chambres les plus pures et les plus saintes, dans cette “âme que Tu m’as donnée [et qui] est pure” [Bénédictions du matin], la flamme d’Israël s’élève, elle est toujours présente et incandescente, cette flamme existe, qu’on la voie ou non, elle est seulement cachée, comme un feu qui couve dans une braise ternie et qui jaillit dès qu’on souffle sur lui* , et elle requiert avec force une liaison étroite et permanente entre la vie et toutes les mitsvot de l’Éternel, et non pas un lien lâche et occasionnel, “une mitsva par-ci, une mitsva par-là”, cette flamme, qui requiert un lien fort et constant avec toutes les mitsvot sans exception, est présente chez tout individu d’Israël sans exception.

Il y a donc dans l’âme un désir infini de la Thora et des mitsvot – afin de déverser l’esprit divin (à savoir l’esprit d’Israël dans toute sa plénitude, qui occupe entièrement l’espace de l’âme – l’âme désire ardemment répandre, épancher et verser cet esprit divin) à l’intérieur des multiples récipients qui lui sont spécifiques – n’y a-t-il pas 613 mitsvot ? – afin de faire ressortir et de concrétiser la pleine expression d’Israël – de cet esprit divin, de cette flamme – dans une complète évidence – et ce désir de mise en évidence se manifeste dans les actes – le comportement et l’accomplissement des mitsvot – et dans les idéaux, la vision du monde découlant des croyances et des conceptions.

Chez les Justes, cette flamme n’est ni latente ni cachée, elle ne se trouve pas seulement “dans la profondeur du cœur, dans ses chambres les plus pures et les plus saintes”, mais elle se fraye un chemin vers l’extérieur par des actes ; elle ne se contente pas “de requérir avec force”, mais elle fait en sorte que “la liaison étroite et permanente entre la vie et toutes les mitsvot de l’Éternel” soit effective. Elle déverse dès maintenant “l’esprit divin (l’esprit d’Israël dans toute sa pénitude, qui occupe entièrement l’espace de l’âme) à l’intérieur les multiples récipients qui lui sont spécifiques, afin de faire ressortir la pleine expression d’Israël dans une complète évidence, dans les actes et les idéaux”.

Les braises s’enflamment dans le cœur des Justes – les braises incandescentes de l’âme d’Israëlun feu de sainteté brûle et flamboie ; et dans le coeur de toute la nation– à la différence des Justes – il se consume perpétuellement. Bien qu’il contienne aussi des individus pervers et corrompus dans le Peuple d’Israël, est le seul peuple saint EN TANT QUE PEUPLE, et il est constamment assoiffé de sainteté* : “un feu perpétuel brûlera sur l’autel, il ne s’éteindra pas” [Lévitique 6, 6]. Le feu ne brûle pas seulement sur l’autel du Sanctuaire, mais également dans toute la nation : sur l’autel de notre âme, il y a un feu brûlant d’amour pour Dieu qui ne s’éteint jamais. “Dans mon cœur je construirai un sanctuaire pour honorer sa gloire, dans ce sanctuaire je mettrai un autel pour faire rayonner sa Splendeur, comme lumière perpétuelle je prendrai le feu de la Ligature [d’Itzhak], et comme sacrifice je Lui offrirai mon unique vie”  [Rabbi Él’azar Azikri]. 

S’il en est ainsi, chez les Justes les braises brûlent et flamboient, alors que dans le cœur de la nation elles se consument d’un bout de l’année à l’autre. Et dans le cœur de tous les sots d’Israël, et même chez les pires d’entre eux, dans le cœur de tous les scélérats d’Israël, ce feu se consume et brûle au plus profond. Même chez les sots, et chez les scélérats qui sont encore pires, le feu brûle malgré tout, mais il est confiné à l’intériorité la plus profonde : “Même les sots chez toi sont pleins de mitsvot, comme la grenade [est pleine de grains**]” [Berakhot 57a].

Dans la nation entière, et pas seulement chez quelques individus, tout désir de liberté – notre volonté de ne pas être asservis à un autre peuple, mais d’être indépendants et libres dans notre propre État, “d’être un peuple libre sur notre terre” [Hymne ‘Hatikva’], à l’opposé de l’exil où le Goy giflait le Juif, et où celui-ci baissait la tête en signe de soumission, toute envie de vivre – le désir de vivre pleinement, dans l’aisance et la sécurité, dans la joie et le confort, l’essence du désir de ‘faire sa vie’, à l’opposé de l’exil où l’on n’avait pas d’autre choix que de se résigner à une vie misérable d’êtres opprimés et écrasés, tant collective qu’individuelle – le désir de l’individu de prendre à pleines mains tous les cadeaux de la vie, le refus d’une vie d’indigent, d’ascète et de déraciné, et aussi le désir collectif de la nation de vivre en tant que peuple installé sur sa terre et dans son État, et non comme des Juifs dispersés et éparpillés aux quatre coins de la Terre, tout espoir de délivrance – c’est un fait que le peuple installé à Sion espère aujourd’hui être délivré, il a confiance en la Délivrance. Même s’il ne l’exprime pas ouvertement, il n’est nullement désespéré et ne craint pas que l’État soit détruit un jour ou l’autre, à Dieu ne plaise ! Toute cette résurrection nationale, qui vient s’exprimer par “tout désir de liberté, toute envie de vivre, tant collective qu’individuelle, tout espoir de délivrance”, ce “puissant désir” [selon les mots de Rabbi Yéhochoua de Koutna, Responsa ‘Yechou’ot Malko’, Yore Déah § 66], d’où viennent–ils ? – ils n’émanent que de cette source de vie, la résurrection nationale fraye son chemin à partir de la flamme intérieure de l’âme ; tout le mouvement sioniste prend sa source dans ce désir ardent pour le Maître du monde. C’est cette flamme d’Israël, qui brûle dans le cœur de la nation d’un bout de l’année à l’autre, qui aujourd’hui se fait jour dans “tout désir de liberté, toute envie de vivre tant collective qu’individuelle, tout espoir de délivrance”, afin de vivre pleinement la vie d’Israël, une vie de Thora et de sainteté, une vie de proximité avec Dieu, sans se cacher ni se limiter. Ainsi, “la lumière de la techouva est présente dans le Peuple d’Israël. Le réveil du désir de la nation dans son ensemble de revenir à sa terre, à son essence, à son esprit et à son caractère, porte véritablement en lui une lumière de techouva*”  [Orot Hatechouva 17, 2]. 

Telle est l’aspiration à la Terre d’Israël, le désir du Peuple d’Israël, dans les dernières générations, de revenir en Terre d’Israël, d’y rétablir notre vie comme autrefois, d’être un peuple libre sur notre terre et de nous relever de nos ruines. Cette aspiration, dans sa profondeur cachée, n’est autre que la flamme qui brûle pour le Maître du monde. Elle peut cependant revêtir des formes diverses et variées, comme la fuite devant les persécutions et les pogroms de l’exil, la volonté de conquérir de nouvelles parties de la Terre d’Israël, la recherche de l’indépendance pour elle-même, et d’autres choses de ce genre. Mais en vérité, la motivation la plus profonde est un désir ardent pour l’Éternel*, c’est le désir du pays de sainteté, terre de l’Éternel, où toutes les mitsvot – à cause des lettres de l’âme qui y sont cachées, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent – prennent corps et ressortent dans leur pleine intégrité, alors qu’en dehors d’Israël l’accomplissement des mitsvot n’a d’autre sens que : “Dresse–toi des signaux* [pour marquer le chemin du retour] [Jérémie 31, 20].

Ce désir intense de publier le caractère de l’esprit divin, c’est-à-dire “l’esprit d’Israël dans toute sa plénitude, qui occupe entièrement l’espace de l’âme”, le caractère divin qui habite l’intériorité secrète d’Israël, ce désir caché et inconscient de réaliser la volonté divine, de traduire la foi dans les actes de la vie par l’accomplissement des mitsvot, de relever la tête dans l’esprit divin revêtu de sa grandeur authentique, cet ardent désir de marcher la tête haute avec un surplus de force et de liberté, mobilise tous les cœurs, avec cette différence que dans le cœur des Justes cette flamme se manifeste ouvertement, alors que dans le cœur des sots d’Israël, et même dans celui des scélérats d’Israël, elle brûle dans la clandestinité. Mais quoi qu’il en soit, ce désir mobilise tous les cœurs, et tous désirent s’unir à lui* [l’esprit divin] pour goûter aux délices de sa vie : “Goûtez et voyez comme l’Éternel est bon !” [Psaumes 34, 9]. Tous veulent goûter la vie délicieuse de la spiritualité divine. “C’est pourquoi j’aime tes mitsvot plus que l’or le plus fin” [Psaumes 119, 127]. 

À l’opposé de l’exil, dont la malédiction est la peur : “Ta vie sera pour toi suspendue au doute, tu auras peur jour et nuit, tu ne croiras pas en ta propre vie, le matin tu diras : ‘qui [nous] donnera le soir ?’, et le soir tu diras : ‘qui [nous] donnera le matin ?’, à cause de la peur de ton cœur terrorisé, et du spectacle que verront tes yeux” [Deutéronome 28, 66-67], voici que revient maintenant la bravoure du cœur, qui montre au monde entier la détermination de la nation – tous les peuples voient une nation valeureuse qui revient sur sa terre – à préserver son caractère, son nom et ses valeurs, sa foi et son idéal – sachons que tout ce courage, toute cette ardeur, l’éveil à la renaissance et la volonté de revenir à notre terre et à notre patrie, à notre langue, à notre culture et à notre héritage, tout cela n’est que la partie émergée de l’iceberg : cette bravoure fait partie du désir ardent d’une vie de vérité, d’une vie de toutes les mitsvot, sur laquelle la lumière de la Thora brillera pleinement dans toute sa bienfaisance.

Le peuple veut revenir à la Terre d’Israël, établir l’État d’Israël, il veut la paix et la sécurité, la prospérité économique et le confort, mais tout cela reflète en réalité le puissant désir de la Thora et des mitsvot qui brûle au fond de lui. S’il paraît étonnant, aux yeux de quiconque se tient au loin, – pour un homme au regard superficiel, qui ne sait pas voir l’intériorité des choses, que dans tous les courants de pensée qui s’éloignent apparemment non seulement des mitsvot, mais de la foi elle-même, puisse soudain palpiter le souffle de la vie dans sa force intérieure, [tourné] non seulement vers une approche générale de la Divinité, – ce ne sont pas de simples croyants, mais aussi vers la vie d’Israël véritable, – ils s’éveillent à vivre dans la pratique quotidienne des mitsvot, vers l’observance détaillée de l’ensemble des mitsvot, toutes appartenant à un seul ensemble, comme une partie de nous-même, dans la conception et dans l’idée, dans le lyrisme et dans la pratique, comment l’esprit de vie peut-il souffler brusquement sur tout le Peuple d’Israël, et l’amener au bout du comptet à se représenter les mitsvot, à les méditer dans ses pensées, à s’en éprendre dans des poèmes, et même à les accomplir effectivement ?! Le Rav répond qu’en vérité, ces choses–là ne peuvent être comprises par celui qui reste au loin, qui regarde la réalité de façon superficielle et qui évalue tout en fonction des comportements extérieurs, – en revanche, cela n’étonnera nullement celui qui est lié dans les profondeurs de son esprit aux profondeurs de l’Assemblée d’Israël, et qui connaît les merveilles de ses ressources cachées, les aptitudes, les dispositions naturelles de la nation, et sa psychologie nationale. Là est le secret de la bravoure, ceci est le grand secret caché derrière la bravoure que voient nos yeux, la montée en puissance de la vie qui ne s’achèvera jamais* et ne disparaîtra jamais, parce que c’est la nature d’Israël, et que la nature ne change jamais !

Nous n’avons pas à nous inquiéter, finalement se réalisera le verset “Vous observerez mes décrets et mes lois – un jour nous observerons les ‘décrets’ [houkim’], c’est-à-dire toutes les mitsvot qui s’imposent par ordre divin au-delà de la compréhension humaine, et les ‘jugements’ [‘michpatim’], c’est-à-dire toutes les mitsvot qui s’imposent également selon la morale humaine – que l’homme applique et par lesquels il vit ; Je suis l’Éternel” [Lévitique 18, 5] ; “‘Pour marcher devant l’Éternel dans les terres de la vie’ [Psaumes 116, 9] – c’est la Terre d’Israël”  [Midrach Tehilim chap. 56]. Et dans le traité Yoma [71a], Rav Yéhouda ajoute : “C’est le lieu des marchés”. En effet, notre génération aspire à la vie*, et qu’est-ce que la vie dans toute sa plénitude, sinon se promener dans les marchés de la Terre d’Israël, tout en étudiant la Thora et en pratiquant les mitsvot dans la sainteté et la pureté, à la lumière éternelle de la vérité divine* ?