6. Le cas de Theodor Herzl.

Le mensonge de la séparation entre ‘sionisme laïc’ et ‘sionisme religieux’ est ignoré des hilonim [laïcs] parce qu’ils ne reconnaissent pas la réalité de la flamme intérieure, et il est ignoré des religieux ‘harédim’ [ultra-orthodoxes], parce qu’ils ne reconnaissent pas la réalité de la résurrection. D’une manière générale, il y a une alliance objective entre les harédim et les hilonim pour prétendre que l’État d’Israël est un ‘état d’incroyants’, et que le sionisme d‘Herzl est un ‘sionisme laïc’… Toute parole d’Herzl teintée de sainteté profonde est aussitôt effacée, escamotée et déniée.

Mais en réalité, Herzl était rempli d’une passion profonde. Il écrit dans son journal : “Notre nation n’est une nation que par sa foi” [Journal (I) p. 57], et notre maître le Rav Tsvi Yéhouda écrit à ce sujet que “celui qui pense, qui parle et qui écrit ainsi est un homme de foi, et non un hérétique” [Lenetivot Israël, 2e édition, p. 123, ‘Léhatsdik Tsadikim’] ; “Nous ne connaissons notre identité historique que par la foi de nos pères”, dit Herzl [ibid. p. 149] ; “Je travaille l’idée… Non, c’est l’idée qui me travaille ! Cette idée serait folle si elle n’était pas si pertinente du début à la fin. Dans la langue ancienne, on appelait ce genre d’état ‘imprégnation par la Présence divine’ ” [ibid. p. 93] ; “Il s’étonne que mon cœur s’échauffe tellement pour ‘notre cause’, il ne mesure pas à quel degré mon cœur se consume. Il est vrai que ce n’était pas le cas auparavant, mon judaïsme était loin de moi, disons qu’il se trouvait endessous du seuil de ma conscience. Mais alors que l’antisémitisme pousse les Juifs faibles et opportunistes, ceux dont le cœur s’est ramolli, à se tourner vers le christianisme, chez moi ces pressions ont puissamment renforcé mon judaïsme. Cela n’a aucun rapport avec la dévotion. Avec tout le respect que j’éprouve pour la foi de mes pères, je ne fais pas partie des gens pieux et orthodoxes, et je ne le serai jamais. Mais je n’ai aucune intention de faire quoi que ce soit contre la religion, au contraire, la preuve en est que je veux marcher avec les rabbins, avec tous les rabbins” [ibid. p. 106]. 

Dans son livre Altneuland, Herzl écrit : “Friedrich posa sa main sur la tête du jeune homme : ‘Que le Dieu de nos pères t’accorde son salut’. Et en lui-même il s’étonna de ses paroles après les avoir prononcées. Depuis son enfance, depuis l’époque où il allait à la synagogue avec son père, Friedrich n’avait plus rien su du ‘Dieu de ses pères’. Et voici que cette rencontre étrange évoquait en lui des souvenirs anciens et oubliés, voici que lui revenaient, l’une après l’autre, des pensées nostalgiques sur cette foi puissante de son enfance, quand il entretenait par des prières le lien avec le Dieu de ses pères” [Altneuland 1, 3, éd. F p.147]. “Et tout à coup, parmi ces réflexions entrecoupées de chants hébraïques, Friedrich reconnut et comprit la valeur du Temple. Autrefois, sous le règne de Salomon, le Temple était orné d’or et de pierreries symbole de la fierté d’Israël et de sa force. Il était décoré d’or, d’argent et de bronze, de bois de cèdre, de cyprès et d’olivier dans le goût de l’époque, et il était objet d’admiration. Cependant, malgré toute cette magnificence liée aux idées de l’époque, il n’est pas possible que les Juifs aient versé des larmes pendant mille huit cents ans sur la réalité objective de cet édifice remarquable. Ce n’est pas sur les murailles de ce bâtiment détruit qu’ils ont pleuré en se tenant à côté des ruines – pleurer ainsi pendant dix-huit siècles serait une insigne sottise ! Non, ils gémissaient sur quelque chose qui avait disparu, quelque chose d’invisible, dont le bâtiment était l’expression de pierre. Et Friedrich ressentit cette chose mystérieuse à l’intérieur du nouveau Temple qui avait été reconstruit à Jérusalem. Son cœur fut pris de crainte et de grandeur : voilà que se tiennent ici les descendants du peuple du Dieu d’Israël, et ils reviennent, prêts à donner leur vie pour cette chose disparue. Comme leurs pères d’autrefois ils se tiennent sur le Mont Moria, et les paroles de Salomon reprennent vie : ‘L’Éternel a promis de résider dans la nuée ; voici que j’ai construit un palais pour Toi, siège de ta résidence pour l’éternité’ [Rois I 8,12]” [Altneuland 5, 1, éd. F p.326].

Et il termine son livre par la description suivante : “Dans cette atmosphère inspirée, Friedrich Lœwenberg posa une question, et chacun d’eux y répondit selon son idée. La question était : ‘Nous voyons qu’il existe ici une nouvelle forme de vie sociale communautaire, plus propice au bonheur des hommes que tout ce qui existait auparavant. Quel est l’auteur de cette création ?’ – le vieux Litvak dit : ‘la pénurie’ ;  l’architecte Steineck dit : ‘le peuple qui est revenu et qui s’est uni’ ; Kingscourt dit : ‘les nouveaux moyens de transport’ ; le Dr Marcus dit : ‘la science’ ; Joë Lévy dit : ‘la volonté’ ; le professeur Steineck dit : ‘les forces de la nature’ ; le révérend Hopkins dit : ‘la tolérance mutuelle’ ; Reschid Bey dit : ‘la confiance en soi’ ; David Litvak dit : ‘l’amour et la souffrance’ ; quant au vieux rabbin Samuel, il se leva et dit solennellement : ‘Dieu’” [Altneuland 5, 6].  Voilà comment Herzl termine son livre : c’est le Saint-Béni-Soit-Il qui a créé l’État d’Israël !

Quand le Kaiser allemand visita la Terre d’Israël en 1898, et qu’il exprima le désir de rencontrer Herzl à la tête d’une délégation sioniste, Herzl lui écrivit une lettre avec cette conclusion étonnante : “Le secret de l’Éternel se révèle sur nous dans ces heures historiques pour le monde. Nous n’avons rien à craindre puisque l’Éternel est avec nous [propos publiés par le Dr Georges Weisz dans le bulletin ‘Ma’ayané Hayéchou’a’ n° 273. Voir le développement dans son livre : ‘Theodor Herzl – une Nouvelle Lecture’].

On voit donc que les hilonim ont falsifié le personnage d’Herzl en faisant de lui un renégat, et que les harédim, eux aussi, l’ont falsifié de la même manière (…).