Avec l’arrivée de notre père unique commence une nouvelle étape de la vie du monde : “Deux mille ans de Thora” [Sanhédrin 97a-b]. Avraham notre père et nos autres Patriarches étaient des gens droits qui se caractérisaient par leurs qualités morales, des gens au cœur bon, et non des gens querelleurs cherchant la dispute, assoiffés de sang comme ceux qui les avaient précédés. Sur eux la Thora put apparaître. Ils commencèrent de s’imprégner authentiquement de la voix divine qui se faisait entendre dans la profondeur de leur âme. Avraham était une âme pure, c’est pourquoi il absorba la Thora du fond de lui-même dans la pureté. Le même monde, et la même voix divine appelant l’homme de l’intérieur, existaient déjà avant Avraham. Mais les générations qui l’avaient précédé étaient des gens dévoyés, qui captaient les messages divins de manière déformée. Au contraire, Avraham était pur et droit, et il intégrait tout dans la rectitude. C’est un fait que l’homme intègre les données selon ce qu’il est.
À la vérité, même avant Avraham il y eut des justes dans l’humanité, comme par exemple Noah’, Chem, Éver et Hanokh. Mais ce furent des éclairs qui jaillirent brusquement, puis s’éteignirent sans donner lieu à une continuité. Ils chantèrent leur chant en solitaires, puis s’en allèrent rejoindre leurs ancêtres. Avraham notre père, quant à lui, avait une force de mobilisation considérable, capable de mettre en mouvement non seulement lui-même et non seulement son époque, mais aussi la suite des générations. Ce qui apparut chez Avraham se poursuit aujourd’hui grâce à son influence sur toutes les générations :
Car Je l’ai connu, pour qu’il ordonne à ses enfants et à sa maison après lui de garder le chemin de l’Éternel, pour faire le bien et la justice. [Genèse 18, 19]
Pourtant, Avraham notre père lui aussi eut des échecs dans sa descendance, en la personne de son fils Ichmaël. Bien qu’il ne fût pas qu’un simple non-Juif [Genèse 17, 18 ; Zohar Vaéra 32], des problèmes apparurent avec lui, et Sarah le renvoya avec sa mère sur l’ordre de Dieu. Itzhak eut deux fils, Essav et Yaakov. Essav était plus proche qu’Ichmaël : il était le frère jumeau de Yaakov et il avait les mêmes parents que lui. Mais lui aussi dévia vers l’extérieur. C’est seulement chez Yaakov notre père que tous les enfants restèrent à l’intérieur, et à partir d’eux fut formé par la suite le peuple d’Israël.
Les déchus de nos pères, Ichmaël et Essav, fondèrent eux aussi des religions mondiales, Essav le christianisme et Ichmaël l’islam. Le Rambam explique que ces religions, bien que pleines d’erreurs, constituèrent malgré tout des canaux par lesquels la Thora se répandit de par le monde. Elles servirent de transition, bien qu’obscure, d’un culte étranger primitif et barbare vers une foi plus humaine bien qu’étrangère [voir Rambam, Lois sur les Rois, 11, 4].
Mais la continuation d’Avraham notre père dans sa pureté ne se trouve que chez Itzhak, Yaakov et les Bné Israël.
(Paragraphe suivant : 3.2. La Thora des Patriarches)