David dans ses Psaumes et Isaïe dans ses visions…


Rabbénou Méïr Simha Cohen de Dvinsk  (Lituanie 1843 – 1926)


« Jusqu’à quand te déroberas-tu de côté et d’autre… ? » [Jérémie 31, 22]

À partir du moment où Abraham notre père reconnut seul son Créateur, il voua tout son espoir et sa confiance à l’héritage de la Terre Sainte pour ses fils. Il la parcourut en long et en large et y planta un tamaris [Genèse 21]. Après lui, Isaac ensemença le pays et y creusa des puits [Ibid. 26]. Et ensuite, Jacob y construisit sa maison. Le sommet de leurs aspirations était que leurs fils demeurent au pays du Mont Moriah.

Et depuis le jour où notre sainte Thora nous fut donnée, la prophétie ne cessa de nous ordonner d’habiter dans ce Pays. Il n’existe aucune section hebdomadaire de la Thora qui ne mentionne Érets-Israël, et même s’il est question des mitsvot liées à la personne, il est dit : « Quand Il t’amènera… », « Quand vous arriverez… » – il faut entendre : accomplis la mitsva pour mériter de rejoindre Érets-Israël. Et même en ce qui concerne les mitsvot abstraites, applicables en tout lieu et en tout temps, comme celle d’honorer ses parents, il est dit : « Pour que tes jours se prolongent sur la Terre que l’Éternel ton Dieu te donne » [Exode 20, 12].

L’Éternel, béni soit-Il, a été si l’on peut dire plus exigeant sur l’honneur dû à la Terre que sur le sien propre, puisque lorsqu’ils firent le veau d’or, et après qu’ils se furent repentis, Il leur pardonna : « L’Éternel se ravisa de faire le mal qu’il avait annoncé pour son peuple » [Exode 32, 14] ; tandis que lorsqu’ils calomnièrent et dénigrèrent cette Terre désirable, Il ne leur pardonna point, comme il est dit : « Ne montez pas, car l’Éternel n’est plus parmi vous » [Nombres 14, 42]. Et du jour où Sion et Jérusalem furent choisis, autant David dans ses Psaumes qu’Isaïe dans ses visions, autant Jérémie dans ses réprimandes qu’Ézéchiel dans ses paraboles, ne cessèrent d’exalter la mitsva d’habiter en Érets-Israël et d’épancher leur âme dans le frémissement de sainteté évoqué par Jérusalem. Le prophète dit : « Aie soin de dresser des signaux… » [1] [Jérémie 31, 20]. Et Daniel, et après lui les Sages de la Grande Assemblée, fixèrent comme loi pour tout Israël de prier trois fois par jour (Daniel 6, 11 ; Traité Berakhot 31 et 33), afin que l’Éternel dans sa miséricorde conduise son peuple sur le chemin du Retour à Sion et à Jérusalem. De même dans la bénédiction sur les céréales, on doit prier à tout moment pour la Terre et pour Jérusalem… et c’est une mitsva pour tout homme d’aider par tous ses moyens à la réalisation de cette mitsva. Et de fait, c’est peut-être bien à ce sujet qu’il est dit : « Jusqu’à quand te déroberas-tu… » [2] !

Quoi qu’il en soit, on n’est pas quitte pour autant de la mitsva d’habiter en Érets-Israël, et quiconque en a la possibilité doit l’accomplir. Le mérite de cette mitsva protégera le peuple d’Israël dans toutes ses demeures, et le préservera de tout mal. Nos yeux pourront alors contempler son retour à Sion, et nos oreilles seront témoins de la voix du messager « qui dit à Sion : « ton Dieu est Roi ! » » [Isaïe 52, 7], très vite et de nos jours, amen.

[Livre ‘Chivat Tsion Bemilouïm’]


[1] « Aie soin de dresser des signaux, érige-toi des poteaux indicateurs, fais bien attention à la chaussée, au chemin que tu as suivi ; reviens, ô vierge d’Israël, reviens dans les villes qui sont les tiennes » (Jérémie 31, 21).
[2] En effet, cette admonestation vient juste après l’invitation à revenir du verset précédent : « Aie soin de dresser des signaux… ».