6. La réalisation des désirs

Elle a grandi et s’est élevée d’un seul coup. Si la Génération s’était élevée lentement, les enseignants se seraient mis à jour en parallèle. Mais cette génération galope bien plus vite que ses maîtres ! On voit cela aussi dans le monde des ordinateurs : les progrès sont si rapides que les enseignants n’arrivent pas tenir le rythme.

Quand notre maître le Rav Tsvi Yéhouda abordait certains sujets, nous ne comprenions pas toujours où il voulait en venir. C’est parfois seulement dix ou vingt ans plus tard que nous comprenions qu’il avait anticipé les problèmes, et que son intention était de nous y préparer. Quant au Rav Kook notre maître, ses écrits sont une nourriture spirituelle pour les siècles à venir !

L’aspiration à la grandeur et aux grandes choses peut venir d’un seul coup, sans préparation particulière, ou on peut la recevoir par un travail laborieux, étape par étape, progressivement. Dans ce cas, l’homme s’avance un peu, il voit de ses yeux un nouvel objectif proche et il l’atteint, puis il continue d’avancer. Mais dans le premier cas, que se passe-t-il quand un homme ressent brusquement un désir de grandeur et exprime de grandes exigences ? Cela dépend si on l’y prépare ou non.

Si on ne le prépare pas au désir de grandeur, il se met à mépriser et à rejeter le monde ‘petit’ qui l’entoure, et il le tourne en dérision. De cette manière il n’arrive à rien, car on n’accède pas à la grandeur instantanément, ce n’est pas parce qu’on aspire à la grandeur qu’on s’y trouve déjà ! Ce n’est pas parce qu’on a lu le premier chapitre de Messilat Yécharim sur la délectation en Hachem qu’on y est déjà arrivé. Dans ce genre de situation intermédiaire, l’homme se sent ‘chauve de part et d’autre’ [= ‘frustré des deux côtés’, cf. Baba Kama 60b, car il a l’impression d’avoir ‘lâché la proie pour l’ombre…’]. En fait, l’aspiration à la grandeur ne crée pas encore la grandeur, mais elle suffit déjà à effacer la petitesse, et cela crée une grave crise.

Mais si on prépare cet homme, si on le guide pour réaliser ses grandes aspirations, il ne se cantonnera pas dans la révolte et le mépris. Il faut lui préparer le chemin et lui dire : “Regarde : Dieu merci tu as une aspiration à la grandeur, mais dans la réalité tu es encore dans la petitesse. Pour parvenir à la grandeur, il y a un parcours que tu dois suivre”. C’est ce que fait le livre Messilat Yécharim, qui est construit sur des niveaux successifs, avec à chaque niveau des voies d’accès particulières et des méthodes particulières pour éviter de s’égarer. De plus, le Ramhal présente ce processus d’élévation par étapes dès l’introduction de son livre. Quand on propose à quelqu’un de faire des efforts longs et difficiles, si on lui dit : “Tout cela est destiné à te faire arriver au bout de ton chemin, à cet objectif que tu désires tant”, alors il acceptera de persévérer dans cette voie difficile. Il en est de même pour l’État d’Israël dans sa situation actuelle : l’homme n’en viendra pas à se désespérer si on lui présente la situation dans la perspective de son objectif final de grandeur et de sainteté.