2. La lutte entre Yaakov et Essav

D’Itzhak sont nés Yaakov et Essav. La grossesse est difficile :

Les enfants se battaient dans son ventre.

Genèse 25, 22.

À l’intérieur il y a une bataille, une lutte au corps-à-corps, et cette lutte continue même à la naissance :

Et sa main tenait le talon d’Essav.

Ibid. 26.

…dans une tentative de l’attraper, de le retenir, de prendre l’avantage. Rivka sent qu’il y a là une chose hors normes :

Elle alla questionner Dieu.

Ibid. 22.

Alors vient l’explication divine sur le sens de cette querelle : il ne faut pas la prendre à la légère, ceci n’est pas là une dispute familiale qu’on puisse analyser par la ❛dynamique de groupe❜. C’est une querelle cosmique, une lutte qui embrasse des enjeux mondiaux, une guerre pour la gouvernance des mondes. Ce sont deux nations différentes, qui se battent pour donner une forme au monde :

Il y a deux peuples dans ton ventre. Deux nations se sépareront à partir de ta matrice, et une nation aura l’avantage sur l’autre.

Ibid. 23.

La querelle porte sur ❝l’héritage de deux mondes❞ [Rachi], à savoir ce monde ci et le monde à venir, le monde matériel et le monde spirituel. Chacun ne veut-il qu’un seul monde ? Non, chacun veut les deux, à la fois ce monde ci et le monde à venir. La question posée est : qui dominera qui ? Est-ce que le monde de la matière dominera le monde de l’esprit, ou l’inverse ? ❝Quand elle passait à l’entrée des lieux d’idolâtrie Essav se débattait pour sortir, et quand elle passait à l’entrée des synagogues Yaakov se débattait pour sortir❞. L’idolâtrie consiste à fournir les besoins matériels de l’homme, à satisfaire tous ses désirs dans un laisser-aller sans limites, parmi lesquels les désirs de débauche et même les désirs de meurtre qu’il y a en lui.

Mais n’y a-t-il pas un esprit dans l’homme ? C’est pourquoi l’idolâtrie vient donner une caution morale spirituelle à une vie de désirs physiques. Elle asservit l’esprit à la matière [voir Orot Hakodech II, p. 488]. Nos Sages témoignent sur le peuple d’Israël, que même au moment où il fauta et où il inclina vers d’autres dieux, il savait que toutes les théories idolâtres n’étaient destinées qu’à servir de couverture spirituelle à une vie de défoulement des passions :

Israël savait qu’il n’y avait rien de réel dans l’idolâtrie, et ils ne lui rendaient un culte que pour se permettre ouvertement la débauche.

Sanhédrin 63.

À l’opposé vint la conception pure, selon laquelle le corps est asservi à l’esprit. Le côté le plus élevé de l’homme guide son côté matériel, la construction matérielle est ordonnée par l’esprit.

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