(Isaïe 52, 2)
En réalité, le chemin qui se tourne vers le sommet de la pensée et de l’idéalisme, c’est-à-dire celle de l’homme naturellement droit, celle du hassid authentique, est le seul qui éclaire la vie – dans la pratique, l’emplit de limpidité et la fait rayonner pour l’installer sur la base qui lui est destinée selon sa vraie nature, enfouie au fond de chaque cœur et de chaque âme. Ce qui est décrit ici n’est pas un rêve irréaliste, car au plus profond de la vie de tout homme il y a une vie divine. Dans un autre texte, le Rav notre maître explique que le hassid authentique se caractérise par une sainteté ‘qui élève la vie’, alors que l’homme qui contrôle son penchant se caractérise par une sainteté ‘qui lutte contre la vie’ ; c’est ce qui fait la différence entre la morale de la Terre d’Israël et la morale de l’extérieur d’Israël, où la vie est malsaine. Seule une morale élevée et idéaliste peut réussir dans la nation d’Israël, alors qu’une morale de bas niveau est vouée à l’échec.
Il faut bien comprendre que l’homme éprouve deux sortes d’aspirations : 1/ des aspirations sublimes, hors de toute limite ; 2/ puisque les premières sont irréalisables, il faut aussi des aspirations intermédiaires qu’il est possible de satisfaire. Autrement dit, il faut avancer progressivement vers les aspirations les plus hautes.
Avec une telle approche, les prisons intellectuelles et morales s’ouvrent – le mot employé est ‘ouverture’. Il existe des emprisonnements de la pensée. On dit : “ceci et cela est interdit… ”, “ceci et cela n’est pas moral…”. Notre génération n’aime ni les chaînes, ni les ordres, ni la contrainte ; notre génération aime la liberté – nationale et individuelle -, elle est même prête à donner sa vie pour cette liberté : “Être un peuple libre sur notre terre” [Hatikva] – ce n’est pas seulement se libérer des Britanniques, mais se libérer de toute barrière. L’amour de la liberté a amené la génération à rejeter la Thora, qui semble contredire l’intelligence et la morale, la vie, la nature et la liberté. C’est pourquoi il faut expliquer que la Thora ne contredit pas la liberté.
Et pourtant, dira-t-on, la Thora est pleine d’interdictions ! C’est cela la liberté ? Réponse : un hassid authentique, un homme qui est naturellement droit, se sent libre en accomplissant la Thora. Par contre, un homme qui est dans la contrainte de soi ne se sent pas libre. Nous avons mentionné que la nation a le devoir d’être droite et non contrainte, ce qui veut dire que nous avons le devoir d’intensifier le travail d’explication sur la supériorité de la droiture, et c’est alors seulement que la nation cessera de se révolter.
Dans le futur à venir, nous accomplirons des mitsvot sans la contrainte des commandements, comme l’ont dit nos Sages : “Les mitsvot seront annulées dans le futur à venir” [Nidda 61b]. Bien-entendu, cela ne veut pas dire que dans l’avenir nous pourrons transgresser la volonté divine (Dieu nous en préserve !), mais cela veut dire que nous n’aurons plus besoin d’ordres pour cela. C’est du fond de notre nature que nous accomplirons les mitsvot. En fait, ce ‘futur à venir’ commence dès maintenant ! Dès aujourd’hui, la nature du Juif est de ne pas tuer, de ne pas voler et de ne pas se débaucher, et ce naturel-là se concrétise de plus en plus. Nous n’avons pas besoin pour cela de nous forcer artificiellement à obéir à des ordres, c’est notre vie qui est ainsi.
Le niveau de la maîtrise ne se manifeste pas seulement par le fait de se contrôler et de s’empêcher de transgresser, il peut aussi se manifester par le fait de s’élever au-dessus des idéaux inférieurs.