12. La pratique sociale

Alors [et seulement alors,] la pratique sociale – la vie quotidienne – devra forcément s’élever elle aussi au niveau de la noblesse de la pensée la plus pure, la plus sereine, plus il y aura d’hommes droits dans la nation, plus ils influenceront  la nation entière vers la droiture, 1/ de manière secrète ; 2/ par leur exemple personnel, ce dont le Rav notre maître parle beaucoup ici ; 3/ par un travail d’explication à la nation.

Pour ce qui concerne la sainteté, il faut une démarche mesurée. Il faut s’élever progressivement, se garder de la brutalité et de l’extrémisme, de devenir une ‘bête de sainteté’et la plus clarifiée, dépassant toute la petitesse – il faut expliquer comment la politique, par exemple, n’est pas une chose petite – et les vexations – quand les gens disent du mal les uns des autres ; la médisance en politique n’est pas inévitable, la politique aussi, comme toutes les domaines pratiques, peut et doit être pure – ordinaires dans les bas-fonds de la vie où a pitoyablement déchu la multitude – la plupart des gens se trouvent dans ces bas-fonds de la vie, que Dieu leur vienne en aide ! Il existe des gens de valeur, des idéalistes, mais la plupart sont enlisés dans la boue. Eux aussi, il faut les relever vers la sainteté, c’est l’enjeu de la droiture portée au niveau de la collectivité d’Israël.

au point d’avoir même entraîné avec elle ses intellectuels et ses notablesParfois, on entend dire que notre Maître était aveugle ou naïf, que l’amour d’Israël avait égaré son esprit et qu’il ne savait pas ce qui se passait dans le peuple. Ce sont des sottises, car un rav en charge du grand-rabbinat ne peut en aucun cas être candide : tous les jours, des gens le font descendre dans la boue à l’occasion de leurs requêtes au Beth-Din, et de ce genre de choses. Le Rav notre maître a eu la charge successivement des rabbinats de Zeimelis, de Wissek, de Yafo et de Jérusalem. Il ne restait pas caché dans sa yéchiva ! Il savait que “Tous sont saints, tous sont purs, et tous ouvrent leur bouche” ! [prière du matin]. Ainsi, il s’avère que même les intellectuels, ceux dont le rôle est d’élever l’esprit du peuple, se sont laissés enliser dans la boue de la multitude, et de ce fait ils ont soin de lui livrer toute la bassesse qu’elle recherche, ayant à leurs côtés des dirigeants occupés à toutes sortes de manigances et d’escroqueries.

…au point d’avoir agi aussi sur eux – ses dirigeants et ses intellectuels, de sorte qu’ils considèrent eux aussi que toute vérité des plus hautes, toute réflexion des plus élevées – qui surmontent l’abîme où ils ont sombré dans les polémiques, la confusion et l’ignorance – sont des choses sans rapport direct avec la vie dans sa réalité. Ces gens ‘éclairés’ en viennent à dire : “toutes les belles phrases que vous apprenez à la yéchiva sont en-dehors du réel”. Cette affirmation est de la plus haute gravité !

Un jour, on m’emmena de force, avec le Rav Zuckerman et le Rav Tsvi Israël Tao, à une rencontre avec des intellectuels de gauche non religieux. Nous discutâmes ensemble pendant deux jours. L’un de ces penseurs disait : “Je m’identifie au Tanakh ! Je suis la dans la ligne du Tanakh ! Mais on ne peut pas diriger un pays selon ses préceptes”. Par ces mots il détruit tout, c’est comme s’il disait que le Tanakh a été destiné seulement à l’étude, qu’il vise seulement à éveiller l’enthousiasme, mais qu’il n’est pas applicable à la réalité. C’est comme s’il disait que la sainteté est une sorte de chanson fluette qui plane au-dessus de la vie, alors que la vie elle-même est dure, faite d’actions concrètes, et qu’elle exige une guerre menée au quotidien dans la grossièreté et la méchanceté…