1. La force de Yossef

Dans notre paracha nous retrouvons la force de Yossef, qui atteint son sommet avec la mise en place de la politique agraire générale du royaume d’Égypte qui en fait constitue une réforme du système économique de tout le monde antique, dont l’Égypte constitue le carrefour stratégique. La Thora détaille longuement les mesures économiques prises par Yossef pendant les années de misère : le collecte de la monnaie, l’achat du bétail, l’achat des terres, le transfert de la population vers les villes, la politique de fiscalité, etc.

Question :

Pourquoi un si grand intérêt de savoir les détails de l’organisation agricole en l’Égypte ?

Réponse :

Yossef par ses réformes crée une situation de justice. La ligne économique et sociale de son action passe par la concentration des moyens de production au moyen de la nationalisation, et une distribution des biens juste et égale. D’abord il concentre l’argent, puis le bétail, puis la terre, et de cette manière il abolit la propriété privée. Après la nationalisation des moyens de production il déplace la population dans les villes, il rompt les liens familiaux anciens au profit de la concentration, et crée ainsi un nouvel ordre socio-économique. Il distribue dans le public les moyens de production, qui sont dans sa main, de manière qu’ils soient exploités, et il garantit la subsistance au moyen d’un système de fiscalité avancé où les gens ne remettent que 20% de leur récolte à l’état, et gardent le reste pour les besoins de leur famille. La masse des Égyptiens lui est reconnaissante pour ces dispositions :

Ils dirent : ❝Tu nous as sauvé la vie❞.

Genèse 47, 25.

Et de leur côté ils proposent :

❝Nous-mêmes et notre terre serons les esclaves de Pharaon.

Ibid. 19.

Ils sont prêts à renoncer à leur liberté et à devenir entièrement dépendants de l’administration royale. Mais cette proposition ne convient pas à Yossef :

Yossef acheta toute la terre d’Égypte pour Pharaon.

Ibid. 20.

Il achète seulement la terre. L’acquisition d’êtres humains comme esclaves est contraire à la justice du système qu’il entend conduire.

Il est clair que pour mettre en pratique ces idées, il est nécessaire d’exploiter certaines opportunités. Si Yossef avait voulu prendre ces mesures dans un contexte de prospérité, où l’exploitation de la propriété privée était florissante, il se serait heurté à une opposition puissante qui l’en aurait empêché. Il a le sens des réalités, et il attend le bon moment pour mettre en œuvre la justice sociale et économique à laquelle il pense.

Yaakov notre père lui aussi agit de cette manière avec Essav. Il sait qu’Essav est l’aîné par l’âge, mais en vérité c’est Yaakov qui est destiné à être l’aîné et à remplir le rôle de constructeur de la réalité spirituelle, et non Essav. Toutefois, venir directement réclamer le droit d’aînesse ne réussirait sûrement pas, c’est pourquoi il attend. Et voici qu’Essav arrive de la campagne, fatigué :

Gave-moi je te prie de rouge, de ce rouge-là !

Genèse 25, 30.

Maintenant l’heure est venue de tirer profit de la situation au bénéfice de la vérité et de la justice. La réalité est complexe et entrelacée, les situations réelles sont parsemées d’obstacles et n’offrent pas les moyens de concrétiser la vérité en suivant un chemin rectiligne. L’homme qui agit pour la justice doit suivre la réalité jusqu’au moment propice, et exploiter les opportunités pour injecter dans le monde la lumière de la vérité, pour la concrétiser pratiquement par des dispositions robustes.

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