Comme il est longuement expliqué dans l’article le Mouvement des Idées en Israël [dans la suite du livre Orot, pp. 102-118 de l’édition originale], cela ressemble à un homme qui se déprime et se dégrade quand il vit dans la solitude, et qui n’arrive à avoir une vie normale que lorsqu’il est en société. Un tel homme doit s’efforcer d’être stimulé autant que possible par la société, même si dans la solitude il exprime davantage son ‘moi’ spécifique, et si la société lui fait perdre peu de sa personnalité. Il vaut mieux qu’il reste en société, même si sa personnalité s’estompe, plutôt que de s’en éloigner et de ‘faire des bêtises’ !
Il y a des parents qui confisquent ainsi la personnalité et la liberté de leur enfant. “Moi je veux faire tout ce qui me passe par la tête !”, dit l’enfant, et ses parents lui répondent : “une fois que tu te seras cassé les deux bras, que tu auras dévasté trois maisons et que tu auras tué quatre personnes, alors tu feras ce que nous te disons ?!” Il est vrai qu’on porte atteinte à la personnalité de l’enfant, [pensent les parents,] mais mieux vaut pour lui éviter la faute, plutôt que d’exprimer sa personnalité par la faute…
Dans le livre Orot Hakodech [I, p. 95], le Rav notre maître écrit :
“Tout ce qui entre dans une âme sous l’influence d’une autre, bien que ce soit utile d’une certaine façon, car finalement cela lui confère un savoir, ou parfois un utile sentiment de bien-être, en même temps c’est nuisible par l’amalgame d’un fondement étranger à sa personnalité. [L’éducateur est utile et nuisible à la fois, car certes il communique à ses élèves une connaissance importante, mais il leur porte aussi préjudice en faisant intrusion dans leur intériorité.]
“Le monde ne peut atteindre sa perfection qu’en éliminant les influences extrinsèques : ‘Ils ne se feront plus la leçon les uns aux autres en disant : voilà qui est l’Éternel ; car tous Me connaîtront, des plus petits aux plus grands’ [Jérémie 31, 34]”.
Telle sera la situation dans le monde à venir, quand tout homme apprendra directement du Saint-Béni-Soit-Il, sans besoin de l’intermédiaire des enseignants.
“L’attitude qui récuse toutes les influences extérieures dans leurs moindres détails, bien qu’elle semble d’essence destructrice [et qu’elle s’exprime par des paroles incendiaires du genre : ‘qu’est-ce que comprennent les rabbins ? Qu’est-ce que comprennent les parents ? Qu’est-ce comprennent les députés ? Personne ne comprend rien, il n’y a que moi qui comprend, et personne ne me dira ce que je dois faire !’… cet anarchisme, ce ‘caractère destructeur’], c’est cette attitude destructrice qui amène à la construction la plus solide et la plus parfaite, et c’est le seul passage possible vers la vie du monde à venir :
‘Ils sont rassasiés du meilleur de ta maison, Tu les abreuves au fleuve de ton délice’ [Psaumes 39, 9] ‒ ‘il ne faut pas lire ici ‘ton délice’, mais ‘tes délices’, et ceci nous apprend que chaque juste a un délice à lui’ [Vayikra Rabba 27, 1]” .
Le seul endroit où l’anarchisme règne a priori, c’est la yechiva, car chacun des élèves y étudie à son gré, et c’est à partir de cette liberté individuelle associée à leur désir profond qu’ils grandissent en Thora.
“La conscience nationale porte à se garder des influences étrangères, [cette volonté d’indépendance, qu’aucune nation ne nous dise ce que nous avons à faire] est le principe même de la résurrection nationale, et [cette effervescence collective] alimente l’effervescence individuelle, bouscule les ruines, fait les révolutions, construit de nouveaux mondes, solides et lumineux”.
Telle est l’essence de l’article ‘la Génération’ [Maamar Hador, ‘Ikvé Hatson p. 107] : il y a une révolte contre toute autorité : “vous ne penserez pas à ma place, et vous ne me direz pas ce que je dois faire”, et cet anarchisme pose un énorme problème, car d’un côté cette génération n’a pas encore de sources propres assez importantes, mais de l’autre elle est repoussée par l’enseignement des Sages et des enseignants, de sorte qu’elle “se trouve chauve des deux côtés”… [Baba Kama 60b – c’est l’histoire d’un homme qui a deux femmes, une jeune et une vieille ; l’une lui arrache ses cheveux blancs et l’autre ses cheveux noirs, de sorte qu’il n’a plus ni les uns ni les autres – NdT]…
Voir aussi : Sihot Harav Tsvi Yéhouda n° 13, Hador ; lé-Émounat ‘Iténou I, p. 141, ‘Dor Vador Émounato’ ; Maamar ha-Réiya p. 29, ‘li-Tekoufat ha-Ma’avar’.