On traduit habituellement le mot ‘dimayon’ par ‘imagination’, mais en réalité il désigne plutôt une capacité d’analogie : trouver une ressemblance entre une existence abstraite et une existence abstraite. Ceci est fait de manière intuitive par l’âme humaine qui, dès qu’elle entend un concept abstrait, est capable de le traduire en images, et vice-versa d’interpréter une image pour en faire un concept abstrait. Tel est le travail du dimayon. Cette capacité de l’âme est nécessaire à la vie, à la communication : le fait même de parler met en œuvre le dimayon, puisqu’il consiste à transformer des sons en pensée et vice-versa.
Le dimayon est aussi la force essentielle pour recevoir la prophétie : la mise en correspondance de la sensibilité avec l’intellect peut aussi étendre son champ d’action au-delà de l’intellect, au Divin. Le message divin est alors transformé en image, et celle-ci est à son tour interprétée au niveau de l’intellect. Ce chemin indirect du Divin à l’intellect en passant par l’image était commun à tous les prophètes à l’exception de Moché Rabbénou, pour qui le passage du message divin se faisait directement à l’intellect.
Le Rambam, dans le ‘Traité des Huit Chapitres’, insiste sur l’importance de la mémoire, qui fonctionne comme base de données dans laquelle le dimayon va puiser les correspondances. Il met aussi en garde contre les déviations possibles du dimayon qui est capable, en associant les données mnémoniques, de construire des chimères sans aucune existence réelle auxquelles on serait tenté de croire. Tout ce qu’on peut imaginer n’a pas forcément la capacité d’exister. Il faut donc se garder des aberrations que peut produire le dimayon, et prendre soin d’analyser rationnellement les situations de la vie au lieu de se contenter de les imaginer