Très souvent, les gens demandent : “Pourquoi Hachem agit-Il comme cela ?”. En fait, avant de leur répondre il faut comprendre leur question. Il y a deux sens au mot ‘pourquoi’ (voir dans ‘Émounot Védéot’ du Rav Saadia Gaon, le commentaire de ‘Chevilé Émouna’ à la fin du premier article). Nous allons l’expliquer ici à l’aide d’un exemple.
Pourquoi le Ramhal écrivit-il Messilat Yécharim ? C’est expliqué au début du livre : parce qu’il y a des gens qui n’étudient pas le moussar. Et pourquoi Rabbi Yéhochoua Yaakov Falk écrivit-il son livre Pné Yéhochoua ? Parce qu’il fit le vœu que s’il sortait vivant des décombres du tremblement de terre où il était enseveli (le tremblement de terre de Lviv en Ukraine, en 1843), il écrirait un livre où il résoudrait toutes les questions des Tossafot sur Rachi. La raison pour laquelle le Ramhal écrivit Messilat Yécharim est-elle de même nature que celle qui a conduit Rabbi Yéhochoua Falk a écrit Pné Yéhochoua ? Évidemment non. Si je ne connais pas la raison du Ramhal, tout le bénéfice de son livre risque de m’échapper ; mais si je ne sais pas pourquoi Pné Yéhochoua a été écrit, je ne manquerai de rien pour comprendre le livre. En d’autres termes, l’auteur a été amené à écrire son livre, d’un côté pour une raison qui le concerne, et de l’autre côté pour une raison qui concerne le lecteur.
Si maintenant je pose une question de émouna telle que : “pourquoi le monde a-t-il été créé ?”, “pourquoi y a-t-il du mal dans le monde ?”, “quel est le rôle des mitsvot ?”, mon intention est-elle de demander : “quels sont les motifs psychologiques qui ont amené Dieu à faire cela ?”, comme le ‘pourquoi’ du Pné Yéhochoua ? Bien sûr que non ! Ce serait un reniement de la foi, et de telles questions n’ont aucune valeur. Mais nous devons demander : “Quelles conclusions personnelles devons-nous tirer pour servir Dieu de ce que le monde existe, de ce qu’il y a du mal dans le monde, de ce qu’il y a des mitsvot ?” Cette sorte de ‘pourquoi’ est ²celle du livre Messilat Yécharim.
C’est aussi ce qu’écrit Rabbi Haïm de Volojine dans son livre Néfech Hahaïm [troisième section] : toutes les questions sur le Saint-Béni-Soit-Il sont des questions qui nous concernent, et non qui Le concernent ! Pour ce qui concerne Dieu, nous n’avons que sa volonté simplement exprimée.
C’est ainsi qu’Il veut que nous Le servions, et bien que cette réponse soit la plus véridique et la plus élevée, il est impossible de la donner à la génération, car elle ne s’en sera pas satisfaite. La génération a besoin de réponses plus accessibles, qui puissent prendre place dans sa tête. Le Rav notre maître témoigne sur lui-même : “Je suis obligé d’étouffer mon message, et de faire des remontrances au sujet du Chabbat sans aborder sa valeur véritable, qui ne pourrait être ni comprise ni discutée”.