4. Rachel et Léa

Les qualités de Rachel sont évidentes :

Voici Rachel sa fille qui arrive avec le petit bétail.

Genèse 29, 6.

Comme Rivka en son temps, qui vient à la source avec le petit bétail de son père pour y puiser de l’eau, et donne à boire à Éliézer et à ses chameaux avec une générosité visible et tangible, telle est Rachel. Elle est

Belle de caractère et d’apparence.

Ibid. 17.

Sa beauté et son rayonnement sont évidents pour les yeux. L’attirance de Yaakov pour elle est visible et naturelle :

Yaakov embrassa Rachel… et Yaakov dit à Rachel qu’il était le frère de son père.

Ibid. 11-12.

Une conversation s’installe entre eux.

Les fiançailles aussi sont explicites :

Je te servirai sept ans pour Rachel, ta fille la plus jeune.

Ibid. 18.

À l’opposé, Léa est secrète. Elle n’est décrite que par ses yeux :

Les yeux de Léa étaient tendres.

Ibid. 17.

Elle est toute dans les yeux. Les yeux, on peut les fermer, et on ne voit plus rien. On ne dit rien d’elle. Même son mariage est dissimulé. Elle entre dans la vie de Yaakov subrepticement :

Vint le matin, et c’était Léa.

Ibid. 25.

Sans qu’il ait donné son accord, sans les démarches appropriées. Et même alors, Yaakov ne parle pas avec elle, il ne lui reproche même pas ce qu’elle a fait [certes nos Sages ont rapporté qu’il se mit en colère contre elle, mais quoi qu’il en soit on doit apprendre du style de la Thora, qui ne mentionne pas cette colère]. Silence. Sans paroles. Même par la suite, quand ils sont mariés, on ne voit pas qu’il lui parle. Léa est toute en intériorité, cachée. Comme l’exprime le Zohar de manière concentrée :

Rachel c’est le monde dévoilé, Léa c’est le monde caché.

Zohar I, 154 ; Orot Hakodech I, 29 ; Likouté HaGra, fin du Sifra Détsniouta.

Rachel est à l’origine de la réalité nationale dans son dévoilement concret, elle est le corps de notre esprit national :

Belle de caractère et d’apparence – l’éclat du visage.

Rachi sur Genèse 29, 17.

C’est l’intériorité qui illumine le physique.

Mais quoi qu’il en soit, Rachel est la plus jeune et Léa est l’aînée, pas seulement par les années, mais par la grandeur de l’âme. Léa est celle qui a ❛les yeux tendres❜, et les yeux sont le miroir de l’âme, à travers eux se laisse voir l’âme profonde de l’homme. Léa est donc la racine de l’âme nationale d’Israël. Léa pleura parce qu’elle était destinée à celui qui était l’aîné, c’est-à-dire Essav. La vocation de l’aînesse était toute sa vie.

Il y a deux ❛Tikouné Hatsot❜, qui correspondent aux valeurs de ces deux femmes : le ❛Tikoun Léa❜ et le ❛Tikoun Rachel❜. Le ❛Tikoun Léa❜ est dans la joie et le ❛Tikoun Rachel❜ dans la tristesse. À l’origine, dans l’âme, à l’intérieur, il n’y a que de la joie, mais dans la réalité dévoilée, dans l’histoire réelle de la nation, il y a des crises et des malheurs, la tristesse est présente à cause du manque d’accomplissement et d’achèvement. Pour cette raison on ne dit pas le Tikoun Rachel les jours de joie comme le Chabbat, les jours de fête, l’année de Chemita, etc.

Il en ressort que Rachel réalise l’aptitude à réparer la réalité matérielle, et que Léa réalise l’aptitude à construire la réalité spirituelle.

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