1.1. La voix du chofar proclame : “Le monde a un roi !”
1.2. Les sons du chofar : TEKIA’ – CHEVARIM – TEROUA’ – TEKIA’
1.1. La voix du chofar proclame : “Le monde a un roi !”
La mitsva du jour concerne le chofar. Certains pensent que le formule de la bénédiction est “sonner du chofar”, et d’autres que c’est “écouter la voix du chofar”. La halakha tranche pour “écouter…” [Choulhan Aroukh 585, 2].
Qu’y a-t-il au fond de cette écoute ? Car ce ne sont pas des mots, mais simplement un son ! Que cherche-t-on à entendre ?
Dieu s’élève dans l’acclamation, l’Éternel dans la voix du chofar. [Psaumes 47, 6]
Le chofar proclame : “L’Éternel, c’est Lui qui est Dieu !” .
Il porte en lui l’acclamation royale. [Nombres 23, 21]
Le monde a un Roi. Avant que nous n’entrions dans les détails des mitsvot, dans l’amélioration des qualités morales, dans les voies de la techouva et de l’élévation vers Dieu, avant tout cela il y a un principe, à l’origine de tout : il y a un Roi, il y a un Maître du monde.
C’est la voix qui dit :
L’Éternel est un et son Nom un ! [Zacharie 14, 9]
Rien dans le monde n’est ‘un’, il n’y a que L’Éternel. Pour le moment, il y a encore autour de nous des gens sourds, aveugles et bouchés qui ne le reconnaissent pas. La voix du chofar nous fait entrevoir en un éclair le temps où “L’Éternel sera un et son Nom sera un”. Toutes les petites affaires qui occupent aujourd’hui notre intelligence, notre sensibilité et notre imagination, tout cela s’évaporera et disparaîtra, et une seule voix se fera entendre : “Dieu est roi”, et rien d’autre.
Lors du don de la Thora, tout le peuple d’Israël, hommes, femmes et enfants, esclaves et servantes, tous s’élevèrent au niveau de la prophétie le temps d’un instant, le temps d’une seconde. D’après certaines opinions, ils entendirent les deux premières paroles : “Je suis…” et “Tu n’auras pas…” ; d’après d’autres, ils n’entendirent que la première, et d’autres encore disent qu’ils n’entendirent que la voix de l’Éternel, sans mots prononcés. Ce n’était pas une écoute à l’oreille, mais c’est de la manière dont la voix divine parle aux prophètes depuis l’intérieur de leur âme que l’éclair divin les illumina. Cette révélation fut dramatique : quand la voix de Dieu se révèle à l’âme du prophète, sa propre splendeur se retourne contre lui, ses pensées se brouillent, il est déchiré et il tombe [Rambam, Lois des Fondements de la Thora 7, 2]. C’est comme si l’on faisait passer un courant d’un million de volts dans un petit appareil : tout serait grillé et disloqué. C’est ce qui arriva à Israël au Mont Sinaï : leur âme fut volatilisée par la puissance de la révélation divine [Chabbat 86b], et ils demandèrent à Moché notre maître :
Parle-nous, toi, et que Dieu ne nous parle pas directement, de peur que nous ne mourrions ! [Exode 20, 16]
Cet éclair, qui illumina l’âme d’Israël, disait avec une puissance au-delà des mots : “Je suis l’Éternel ton Dieu !”. C’est de cette manière que la voix du chofar proclame : “Dieu est Roi”.
1.2. Les sonneries du chofar : TEKIA’ – CHEVARIM – TEROUA’ – TEKIA’
La voix du chofar se subdivise en plusieurs sonneries : ‘TACHRAT’ = Tekia’ – CHevarim – teRoua – Tekia’.
Rabbi Yechaya Harowitz, surnommé le ‘Chlah Hakadoch’, explique :
- TEKIA’ – un son continu – le bien divin remplit tout.
Dieu fit l’homme droit…
- CHEVARIM – un son cassé, plaintif.
…et eux cherchèrent de multiples complications. [Ecclésiaste 7, 29]
L’homme se coupe de l’écoute de la parole divine. Il soupire et il gémit, malade des complications qu’il s’est attiré lui-même.
- TEROUA’ – un son de youyou, comme les cris que l’on pousse lors d’un enterrement.
L’homme se lamente sur lui-même : “Un jour j’ai été droit, ‘la buée d’une bouche exempte de toute faute’ [Chabbat 119b], comblé de ressources et de bénédictions divines ; mais à présent je me suis dégradé, j’ai perdu la santé, j’ai été bridé, je me suis éteint, je suis tombé, j’ai été déchiré – et j’étais comme mort”.
- TEKIA’ – à la fin, il y a de nouveau un son continu.
Et enfin j’ai été ramené dans le droit chemin, à vouloir me rapprocher du Maître du monde [‘Chné Lou’hot Habrit’, Roch Hachana, chap. ‘Thora Or’ p.141].
Tel est le chemin suivi par tout existant. Au début de la Création tout est droit :
Dieu fit l’homme droit. [Ecclésiaste 7, 29]
et à la fin également :
Le tordu sera redressé. [Isaïe 40, 4]
Mais entre les deux, c’est ‘tordu’, tout est déformé et disloqué. La voix du chofar vient redresser l’homme en puisant dans la force sa droiture première, initiale, qui est toute bonne, qui traverse avec lui le chemin des crises jusqu’à la brisure totale, au point d’en mourir, et qui parvient enfin à le redresser.
Éternel, Éternel, Dieu miséricordieux et compatissant… [Exode 34, 6]
Pourquoi répète-t-on deux fois le Nom de l’Éternel ? Rachi explique : ‘Éternel’ avant la faute, et ‘Éternel’ après la faute. Il y a une lumière divine qui nous emplit avant que nous nous mettions en route ; nous fautons et devenons misérables et vides ; alors de nouveau la lumière divine vient nous remplir. Même après la faute, le Maître du monde est avec nous, il nous attend à la sortie de la prison et nous repartons de nouveau.